Post by YliurJe ne vois pas tellement de raison que la
production alimentaire soit particulièrement touchée, mais il peut y
avoir des problèmes de distribution ou simplement du chômage et plus de
pauvres, et pas toujours de soupes populaires. Et il semblerait que quand
il s'agit de trouver de l'argent pour distribuer de la nourriture contre
les famines, les méchants pays riches le trouvent assez facilement.
Bon, alors, petit topo d'économie politique.
Aux alentours de 1970, la reconstruction d'après guerre étant terminée, les
pays occidentaux ne connaissaient pas de pénuries. Il y avait assez pour
nourrir tout le monde, pour loger tout le monde, soigner tout le monde, et
encore pour que certains profitent de luxe.
Depuis 1970, la productivité a énormément augmenté. Ça s'est fait en
remplaçant trois ouvriers par un technicien et deux machines. Les machines
génèrent du profit pour leur propriétaire, les ouvriers qu'elles ont
remplacés ont été priés de chercher un autre boulot.
Pendant environ 30 ans, ça a marché : les ouvriers ont trouvé du boulot à
produire plus de luxe, pour vendre à nous-mêmes et aux étrangers. C'est la
fameuse croissance.
La croissance, c'est une arnaque pyramidale. Comme toutes les arnaques
pyramidales, quand le marché est saturé, elle s'effondre. Ce qui au fond est
une bonne chose, parce que la croissance est la principale cause de la
catastrophe écologique, mais c'est une autre histoire.
Donc depuis une bonne vingtaine d'années, les ouvriers remplacés par des
machines ne trouvent plus de boulot. Donc n'ont plus les moyens d'acheter à
manger. Voilà comment on peut avoir des pays ultra-riches qui ont des
surplus alimentaires, et en même temps la queue aux soupes populaires.
La solution est connue.
Les profits qui étaient générés par les ouvriers leur revenaient en partie,
et leur permettait, à eux et à leur famille, de vivre, et en vivant ils
faisaient vivre les commerces autour d'eux. Ça brassait de l'argent. Quand
les ouvriers sont remplacés par des machines, les profits vont presque
entièrement aux propriétaires des machines.
Comme les propriétaires des machines n'ont pas besoin de ces revenus, ils ne
les dépensent pas dans des commerces utiles. Ils vont bien l'investir en
produits de grand luxe, et une toute petite partie va ruisseler vers
l'économie des classes moyennes. Mais ce ruissellement dont on nous rebat
les oreilles est en réalité infime. L'essentiel des profits part dans la
finance, où l'argent est essentiellement virtuel : il ne sert pas à acheter
à manger ou à se loger, mais à faire des high-scores contre les autres
financiers, et accessoirement à acheter des lois et des législateurs.
Pour réparer l'économie, il faut donc obliger ces profits à aller à ceux qui
en ont besoin.
Il faut donc une augmentation massive du salaire horaire. Doublement,
environ, pour revenir au niveau de répartition de 1970. Pour que ça marche,
il faut que ça se fasse par réduction et partage du temps de travail :
semaine de vingt heures, sans réduction de salaire.
Mais la tendance va continuer : de plus en plus de métiers vont être
automatisés. Ça n'a pas de sens de réduire encore plus la semaine de
travail. Il faut songer à d'autres modes de répartition du travail :
travailler un an sur deux, par exemple.
Pour que ça marche, il faut découpler la capacité à survivre de l'emploi.
D'un point de vue éthique, il a toujours été choquant de refuser aux gens
les moyens de subsister à moins qu'ils ne travaillent à un métier jugé utile
de l'extérieur. « Lave mes toilettes ou je ne te donne pas à manger », ça
n'est rien d'autre qu'une forme d'esclavage, l'« esclavage salarié », c'est
le mot consacré. Mais de nos jours, ça devient encore d'autant plus choquant
qu'il n'y a plus de toilettes à laver.
Une société aussi riche que les pays occidentaux l'ont été depuis cinquante
ans ne devrait pas conditionner les moyens de subsistance à un travail jugé
utile de l'extérieur. Le seul moyen éthique pour qu'elles fonctionnent
correctement est de donner à chacun, sans condition, les moyens d'une vie
décente. Ceux qui veulent plus qu'une vie décente, ceux qui veulent des
loisirs, du luxe, travailleront pour se le payer, et produiront ainsi assez
pour tout le monde.
Des expériences sur ce principe ont été menées un peu partout dans le monde.
Une des dernières dont on a parlé est la Finlande. Les résultats sont
spectaculaires : l'économie réelle est boostée, le bien-être de la
population augmente considérablement, la délinquance diminue.
Les ministres du travail espagnol, italien et portugais ont appelé à ce que
l'Europe prenne acte de ces résultats expérimentaux, et mette en place la
politique pour tout le monde. Il reste à appeler nos députés pour les forcer
à adopter la même position.
https://basicincometoday.com/portuguese-spanish-and-italian-government-ministers-are-calling-for-the-creation-of-a-european-minimum-income-system/